mardi 22 mars 2016

Paris, St-Germain-d'Ectot, Lille

Je suis en tournée avec le GGRIL, ça se passe très bien!

Avant que je ne l'oublie, j'ai un peu de musique à partager! Voici le concert que j'ai fait en trio avec saxophone et clarinettes à l'Exploratorium le 2 février 2016.

Paris

Alors que j'étais dans le train entre Berlin et Paris, j'ai consulté mes documents de tournée pour me rendre compte que j'étais une journée en avance sur le plan. Autrement dit, le reste du GGRIL était à Vienne ce soir là, comme prévu, mais ça voulait donc dire que je n'avais nulle part où aller en arrivant à Paris. J'ai contacté un peu tout le monde que je connaissais qui connaissait quelqu'un à Paris, et au bout de quelques heures, j'ai eu un contact.

J'ai été très chanceux. L'ami d'un ami qui m'a hébergé habite près de la Place de la République, c'est à dire à environ 15 minutes de la Gare de l'Est, où mon train arrivait, et à environ 20 minutes de l'Église St-Merri, où je rejoindrais le GGRIL le lendemain. Je me suis donc rendu chez lui à pied et j'ai été accueilli de la meilleure façon : chaleureusement mais sans flafla, voici les clés, amuse-toi bien.

J'ai donc été rejoindre un ami, un Parisien ex-Rimouskois, et nous avons passé une super soirée à faire le tour de la ville à pied. J'ai vu le Centre Georges Pompidou, le quartier Le Marais et une foule d'autres lieux dont j'oublie les noms.

Le lendemain, j'ai rejoint le GGRIL à l'Église St-Merri. Comme de vieux amis, j'ai revu chacun des 15 autres membres du GGRIL comme si on s'était vu hier, malgré les six mois et plus depuis la dernière fois.

La musique était bien, mais il faisait froid dans l'église. Sur le blog du GGRIL, on voit que nous portions nos foulards pendant le test de son.

St-Germain-d'Ectot

Aussitôt arrivé, aussitôt parti. Nous avons quitté Paris le lendemain du concert, après avoir dormi en petits groupes séparés « chez l'habitant ». Il a donc fallu se démêler avec les autobus, violoncelle sur le dos, de la banlieue au centre, avant de prendre la route.

Nous étions fatigués en arrivant à St-Germain-d'Ectot mais nous avons bien joué. La ville est toute petite, surprenant pi pas d'y rencontrer un groupe de personnes passionnées de musique improvisée.

Nous avons logé tous les 16 membres du GGRIL dans une petite maison de campagne. J'ai passé mon tour sur la visite du site du débarquement en Normandie du lendemain du concert pour rester à la maison, écouter de la musique dans mes écouteurs et relaxer.

Je garde toujours mes bagages bien rassemblés, rien à la traîne, et c'est peut-être pour ça que j'ai oublié mon laptop en train de charger sur le micro-ondes en partant de St-Germain-d'Ectot. Je ne me le pardonne pas encore. Je fais un plan pour le récupérer en France par la poste. Je n'aime pas trop!

Lille

Nous sommes maintenant à Lille. Le concert que nous avons donné hier était notre meilleur, à mon avis. Nous avons fait une première partie seulement le GGRIL, puis une deuxième partie avec des musiciens de la place. Nous étions à la fin plus d'une trentaine sur scène, et j'ai été surpris de m'entendre devant le mur de guitares électriques! C'est signe que tout le monde écoutait bien.

Aujourd'hui, j'ai trouvé des chocolatines, j'ai fait un lavage, j'ai été chercher de la pizza. Nous sommes hébergés à 8 dans un espèce d'appartement moderne et sans personnalité dans un quartier un peu platte. Départ pour Dijon demain.

vendredi 18 mars 2016

En avant, mars!

Je suis à Paris, plus de nouvelles bientôt! Je viens de finir de transcrire ceci, écrit le mardi 15 mars.

L’autre jour, un reporter du magazine VICE est passé à mon travail faire prendre des photos de lui. Il faut croire qu’il n’y a rien de plus hipster que d’avoir déjà travaillé au DarkZone! Il a oublié une plume bleue (un stylo plume là) et c’est aujourd’hui que je l’essaie pour la première fois. Gageons que j’aurai les doigts plein d’encre dans pas long.

- Quoi de neuf depuis la dernière fois?
- As-tu une demi-heure?

Je n'ai pas écrit depuis un moment. Je me concentrerai ici sur le mois de mars et irai repêcher les nouveautés, en commençant ça au 1er mars.

Au travail

Puisque je pars en France après-demain, mon boss a compressé mes 7 journées de travail du mois en deux semaines. J’ai l’impression d’être tout le temps au travail! En me relisant, je vois bien que c’est tout un privilège quand même de travailler si peu. Mais ce que je ressens, c'est que j'ai été beaucoup au travail quand même.

L’autre fois, un client régulier m’a dit qu’il aimait venir passer du temps au cinéma porno quand c’est moi qui est en poste. Il a dit que le fait que je sois de bonne humeur quand j’accueille les clients rend l’ambiance agréable dans tout l’établissement. Quel beau compliment!

Je commence à reconnaître mes clients réguliers. Celui qui m’a fait le beau compliment m’a déjà raconté qu’il est marié depuis je ne sais pas combien de temps. Il s’intéresse aux parfums et dit « Christian Dior » d’une drôle de façon. L’autre fois, il racontait que son mari allait avoir 50 ans et qu’il avait cotisé avec la belle-mère pour son cadeau d'anniversaire.

Il y a aussi celui qui a les cheveux courts gris, qui porte toujours une chemise de couleur claire et qui se présente, avec son petit sac et son lunch dedans, au début de mon shift, pour ne repartir qu’à la toute fin. Il est un peu tannant : il faut toujours que j’aille lui dire que je ferme dans 5 minutes, à 21 h 55, même s’il est tout seul depuis un moment. Sinon je crois bien qu’il camperait là. Il tente de me faire la conversation, mais je ne comprends rien de ce qu’il dit. J’en ai jasé avec un collègue 100% Berlinois born and raised, qui m’a dit que lui-même ne comprenait pas tout de ce que ce monsieur là dit. Enfin, le monsieur laisse souvent la cabine dans laquelle il était avant de partir dans un état déplorable, avec des papiers collés sur le mur et tout; je suis à veille de l’avertir.

Il y a un autre régulier qui vient très souvent -- peut-être un peu moins que le monsieur que je ne comprends pas -- et reste du début à la fin de mon shift. Celui là boit de la Beck’s sans alcool et du Red Bull. Il fume comme une cheminée et ne semble pas toujours se servir du cendrier. Au moins, il n’essaie pas de me parler!

Je continue à aimer travailler au cinéma porno. Je continue à lire, à écrire et à niaiser sur mon téléphone tout le long de mes shifts.

Pour le mois de mars, j’ai donc travaillé au cinéma les 1, 2, 4, 8, 9, 14, 15 mars.

Mais qu’ais-je donc fait avec les journées qui restent, les 3, 5, 6, 7, 10, 11, 12, 13 mars?

Une photographe et la masculinité

Le 3 mars, c’était un jeudi et j’avais donc ma pratique de chorale de 20 h à 22 h. En après-midi, je me suis permis une expérience particulière. Une photographe américaine, actuellement post-doctorante en photo-journalisme à Amsterdam, fait un projet sur la masculinité et recherchait des modèles. Après quelques messages et une visite sur son site internet, nous nous sommes rencontrés et le courant a passé tout de suite entre elle et moi.

Ce que je retiens de son projet, c’est qu’elle cherche à faire réfléchir à certaines idées reçues sur l’homme et la femme. Au cours de ses études en photo-journalisme, elle m’a raconté avoir été confrontée à des classes très majoritairement masculines où, lorsqu’il était question de féminité, les consensus émergeaient un peu trop vite. Le thème, la signification qu’on donne au corps de la femme photographié, dans un contexte journalistique ou artistique, est revenu souvent au cours de ses études, et ses collègues de classe s’entendaient sur l’interprétation que feraient le public de ces clichés (dans les deux sens). La photographe pour qui j’ai posé a donc envie depuis longtemps de faire un projet où des photos d’hommes de tous les types, photographiés et présentés d’une certaine façon, se côtoieraient et inspireraient une multiplicité de sens.

En l’expliquant ainsi, je sens que je ne fais pas justice à son projet. Je lui laisserai la parole quand ça sera plus clair pour elle aussi. J’ai eu envie d’être son modèle pour vivre une expérience nouvelle, mais aussi parce que j’ai tout de suite aimé sa réflexion et ses autres projets.

Le thème de la masculinité m’intéresse personnellement. Après m’être fait traiter de fif tout mon primaire et secondaire -- non parce que je l’étais, mais bien à cause de ma façon de bouger, de mes amies et intérêts, de tout ce qui faisait que je ne me comportais pas comme on s’attend qu’un garçon se comporte --   j’ai fait mon bout de réflexion. Je me rappelle d’une vidéo de moi enfant, qui cours vers la caméra tout excité, les bras dans les airs, collant tout à fait à la façon qu’on certains humoristes d’imiter les « folles du village gay » de Montréal, poignet cassé et voix haut perché en prime. J’apprends encore aujourd’hui, stupidement et irrationnellement peut-être, à faire la paix avec cette image; à faire la paix avec le petit gars maniéré, mais aussi faire la paix avec le grand gars et la honte qu'il porte encore, malgré lui, en se voyant, enfant, bouger de la sorte. J’apprends à déconstruire le genre, ce qui est juste une façon scientifique de dire que j’ai envie de ne pas avoir honte de ce vidéo -- existe-t-il même encore? -- et que je me croise maintenant les jambes comme je veux, au lieu de me forcer à faire comme m’avait appris que les gars faisaient ça, au cours d’une séance d’intimidation ordinaire au Camp Trois-Saumons quand j’avais 9-10 ans. Ces choses là restent.

Au delà de la réflexion sur la masculinité, je me suis rendu compte pendant la séance de photo que c’était une nouvelle façon de me voir. Ce visage, qui est le mien, avec sa peau froissée de cicatrices d’acné et ses dents croches, j’ai hâte de le voir exposé dans un autre contexte que la vie quotidienne. Par le regard de la lentille de la caméra, les défauts deviennent licences artistiques, les plis et accrocs sont intéressants et peut-être même beaux.

La photographe a dit que j’étais un bon modèle, et que j’avais un regard puissant sans jamais être violent. Merci du compliment!

Un projet avec une danseuse

Le samedi 5 mars, qu’est-ce que j’ai fait donc? Je ne sais plus.

Le dimanche 6 mars, j’avais une pratique avec  une danseuse. Il s’agit d’un nouveau projet, ça fait quelques fois qu’on se rencontre, ça commence à prendre forme. Elle est originaire d’Italie mais habite à Berlin depuis quelques années. Je l’ai contactée après avoir vu que Die DeutSCHule, où j'ai pris mes cours d'allemand au début, avait fait la promotion, sur leur page facebook, d’un cours de danse qu’elle donne. J'ai écrit à cette danseuse inconnue à tout hasard, lui disant que j’aime faire de la musique pour la danse, etc. Elle m’a répondu tout de suite que « justement, … », on s’est rencontrés quelques jours plus tard, on s’est tout de suite compris et on s’est donné rendez-vous pour un premier essai. Depuis, on se voit une fois par semaine, on essaie de se rejoindre, artistiquement, elle avec la danse, moi avec le violoncelle.

Le 7 mars, j’ai été me promener, ganz ruhig (bin relax).

Un exemple d’une journée bien remplie

Le 10 mars, je me suis clanché une grosse journée avec des rendez-vous à 10 h, 12 h, 15 h et 19 h.

À 10 h, je rencontrais une photographe. Une autre! J’ai découvert son travail alors qu’elle accueillait une série de concerts (extraordinaires) dans sa petite galerie. Lors des concerts de la série, j’ai passé beaucoup de temps à observer les photos exposées là en attendant que la musique commence. Plusieurs semaines plus tard, ces images me reviennent souvent à l’esprit. C’est un travail très fort selon moi, des images qui n'ont l’air de rien, peut-être (un fauteuil au centre d’une pièce, une piscine extérieure abandonnée, une roche par-ci, un arbre séché par là), mais qui se digèrent lentement et remontent à la surface, multiformes. Je crois qu’il y a une lointaine parenté entre ce qu’elle fait et ma musique; du moins, j’aimerais qu’un jour quelqu’un décrive ma musique dans des termes semblables à ceux que je viens d'utiliser pour parler de ses photos. C’est donc de tout ça que je voulais discuter avec elle, je n’en dis pas plus. Elle fait également du portrait et j’ai bien envie de lui donner le contrat de rafraîchir ma photo officielle d’artiste, qui date de 2007!

À 12 h, j’avais une pratique avec la danseuse du dimanche précédent. On s’est filmé.

À 15 h, j’avais une pratique avec mon trio à cordes. On s’est finalement donné un nom : Thuya. C’est mon idée, le contrebassiste de mon trio fait également partie d'un quatuor de contrebasses appelé Sequoia et je trouve ce nom superbement choisi. Le thuya est un peu plus petit que le séquoia, et puis c’est tellement Canadian. On a vraiment bien joué lors de cette pratique, je vais voir si les autres acceptent que j’en place un extrait quelque part.

À 19 h, c’était ma pratique de chorale du jeudi, qui commençait un peu plus tôt pour les quelques membres, dont je fais partie, qui présenteront la pièce de Dieter Schnebel au prochain concert.

En voyage en voyage #2

Les vendredi 11 mars, samedi 12 mars et dimanche 13 mars, j’ai participé à ma deuxième fin de semaine de pratique intensive avec la chorale. Chorfahrt, qu’ils appellent ça. Mon premier Chorfahrt s’était déroulé du 13 au 15 novembre passés et de répéter cette expérience une deuxième fois m’a permis de prendre la mesure de mon apprentissage de l’allemand et de la vie berlinoise.

Je me rappelle que lors du premier Chorfahrt, je ne savais pas trop quoi faire pendant les pauses. Je ne voulais pas avoir l’air sauvage en lisant dans un coin, par exemple, mais en même temps j’avais beaucoup de difficulté à m’exprimer et je ne comprenais pas tout de ce que les gens disaient. J’avais trouvé la fin de semaine assez épuisante, à vouloir mais ne pas avoir ce qu’il faut pour communiquer. De plus, j’avais eu froid la nuit.

Cette fois, je m’étais traîné une couverture supplémentaire et j’ai très bien dormi. De plus, je n’étais plus gêné d’aller lire dans mon coin quand ça me tentait. Paradoxalement, maintenant que c’est plus facile pour moi de comprendre et m’exprimer, j’avais moins envie de discuter avec les gens. J’ai donc skippé les soirs de fête pour être l’un des premiers au lit vers 23 h. Je me suis quand même bien mêlé au groupe, les pratiques et le répertoire sont super et la fin de semaine a passé très vite.

Un autre exemple d’une journée bien remplie

Ça nous amène donc à aujourd’hui, le mardi 15 mars.

Ce matin, de 10 h à 12 h j’avais une autre pratique avec la danseuse. On s’est filmé encore une fois, c’était notre dernière pratique avant mon départ pour la France et c’était notre meilleure. Ça adonne bien car on voudrait se servir de ces images pour se « vendre » un peu, présenter déjà ce qu’on fait quelque part.

Je suis donc au travail depuis 13 h et j’écris depuis un peu plus de trois heures. Le client régulier qui veut toujours me faire la conversation (et que je ne comprends pas du tout) n’est pas là (il était là hier!) et c’est très tranquille.

Ce soir, vers 23 h, je rencontre la responsable des évènements dans un bar. Je vais lui proposer une série de concerts dont je serais l’hôte. Qui n’essaie rien n’a rien, wish me luck!

Demain, je rentre en studio pour la journée tout seul avec mon violoncelle et le preneur de son. Le projet est secret, je n’ai rien dit ici!

Tournée du GGRIL

Puis, le jeudi 17 mars, c’est le grand départ. Berlin-Paris en train, départ à 8 h 21 du matin, puis je rejoins le GGRIL.

Nous avons décidé de publier un blog quotidien de notre tournée, voici le lien pour les nouvelles fraîches :



J'ai déjà contribué par un texte de présentation, de mon point de vue sur la tournée et tout ça :