lundi 28 septembre 2015

Berlin : Jours 4 à 7

Ce soir je me paye la traite. Je viens de m'ouvrir une bière 500 mL à 1,30€ (1,95$ CAD) et j'écris un long blogue dans lequel je tenterai de résumer mon état d'esprit en ce début de périple : ma recherche d'appartement et quelques faits saillants des derniers jours.

Avant de me lancer, je me félicite d'avoir apporté mon petit speaker bluetooth avec moi. Sérieusement, depuis que j'ai laissé mon kit de son au mois de juillet, je me rends compte à quel point les gens ne sont pas équipés pour écouter de la musique à la maison. Personnellement, j'ai besoin d'un kit de son dans chaque pièce! Dans la cuisine pour cuisiner, manger, faire la vaisselle, dans la chambre pour des vidéos et de la musique au lit, dans le salon pour plier du linge, dans la salle de bains pour prendre sa douche... Et des haut-parleurs de cellulaire ou de laptop, c'est très bien mais ça prend plus qu'un tweeter de game boy quand on aime entendre la bass. Alors, voilà, c'est comme ça que ça part, avec le dernier Autechre dans mon petit speaker et une bière de Späti (diminutif de Spätkauf, Spätverkauf, Spätverkaufsstelle, ce qu'on appelle « dépanneur » au Québec) qui ferait rougir de jalousie n'importe quelle bière d'importation de la SAQ.

Augustiner Braeu München Edelstoff Exportbier + Gadgetree bluetooth speaker

La recherche d'appartement se poursuit


J'ai écrit ce bout là tantôt au Schwarzes Café, Kantstraße 148, en buvant un Verlängerter Espresso avec un russischer Zupfkuchen (parfois, je ne sais pas trop ce que je commande, comme dans le cas de ce « gâteau russe », mais il faut oser! Et c'était bon).

 
La terrasse (der Hofgarten) du Schwarzes Café.
Photo prise sur leur site
Nous sommes lundi le 28 septembre 2015 et ça fait une semaine que je suis à Berlin, une semaine que je vis dans ma valise, une semaine que je passe la majeure partie de mon temps dans ma tête à répéter des phrases et des mots-clés en allemand, à réfléchir à moitié en anglais à moitié en français, à faire toutes sortes de plans.

Ça fait 7 jours que ma priorité est de me trouver un appartement et des colocs. Ça fait 7 jours que je me réveille et me connecte aussitôt au site wg-gesucht (WG est un diminutif de Wohngemeinschaft, la façon dont les allemands parlent de colocation et gesucht, ça veut dire qu'on cherche!). J'envoie des emails à tout le monde qui se cherche des colocs à long terme dans les quartiers Kreuzberg et Neukölln et à tout le monde qui se cherche des colocs à court terme dans les quartiers pas trop loin du centre de la ville, de mémoire : Kreuzberg, Neukölln, Charlottenburg, Schöneberg, Prenzlauerberg, Mitte, Tempelhof, Friedrichshain, Wedding. Je cherchais l'équivalent de 300€ et moins par mois, je regarde maintenant toutes les annonces en bas de 400€ par mois (300€ = 450$, 400€ = 600$, dans l'un ou l'autre des cas je n'aurai jamais payé aussi cher pour me loger).

Je me dis que c'est statistique. Plus j'envoie de messages, plus j'ai de chances d'avoir une réponse. Je prends le temps de peronnaliser chaque email au contenu de l'annonce, de répondre aux exigences spécifiques de chaque coloc potentiel, de faire un peu d'humour pour avoir l'air gentil, de dire qui je suis et ce que je fais en quelques mots. Tout ça prend beaucoup de temps, entre autres parce qu'il me faut traduire tout le contenu de l'annonce de l'allemand à l'anglais (ou au français, c'est rendu que je ne sais plus trop dans quelle langue je fonctionne) et le remettre en contexte en utilisant l'anglais le plus basic possible, avec quelques insertions allemandes au travers, pour montrer que je fais un (gros) effort pour ne pas être un obnoxious tourist.

Je n'ai reçu aucune réponse. Aucune! Hier, j'ai commencé à me demander si je n'avais pas mal compris quelque chose sur le site (unilingue allemand) wg-gesucht, mais tous les courriels de confirmation dans ma boîte de réception me confirment le contraire. Est-ce que le contenu de mes messages est mal reçu? J'en ai fait lire quelques uns à un ami berlinois et tout est beau, ça passe, c'est même assez bien. Est-ce que les gens préfèrent un coloc qui parle allemand? Est-ce que les « Canadiens » ont mauvaise réputation? Je suis tiraillé entre ces deux conseils de mon idole (à lire avec plus qu'une pointe d'humour), Dr. Phil : quand une tactique échoue après plusieurs essais, soir que « you do it until [it works] » (donc, je continue à faire la même chose), soit que « you can't expect a different outcome using the same strategy » (donc, il me faudrait repenser le tout).

Enfin, les Berlinois à qui je parle de ça sont unanimes : il est désormais très difficile de se trouver des colocs à Berlin, et je ne dois surtout pas perdre espoir. La situation est à l'inverse de ce que j'ai connu au cours des 12 dernières années, que ce soit à Rimouski ou à Montréal, où j'étais l'unique signataire de mon bail de location et où c'était à moi de « charmer » les colocs éventuels et shifter la compétition venant d'autres chercheurs de colocs. Ici, ceux qui ont déjà un appart ont le beau jeu. Ils reçoivent, à ce qu'on me dit, une cinquantaine de réponses pour leur annonce. Ils se payent ensuite le luxe de faire un premier tri et passer une dizaine de colocs potentiels en entrevue avant de faire un deuxième tour, dans plusieurs des cas, avec les candidatures retenues.

Où suis-je donc maintenant? Eh bien, ce n'est vraiment pas si mal à bien y penser! Après les terribles (bon, ce n'était pas si pire quand même) cinq premières nuit à l'hostel, j'ai déménagé mes pénates chez un ami dont le coloc est parti en voyage pour une semaine et qui me prête sa chambre sans frais. Ouf! Merci!

Vendredi passé le 25 septembre, j'ai passé une première entrevue avec des colocs potentiels. Ils sont 5 gars à se partager une WG (appartement en colocation) dans Neukölln. Ils m'ont semblé vraiment cool, en plus d'être situés exactement dans le quartier où je veux habiter, dans mes prix, mais ça n'a pas fonctionné. Ils m'ont écrit hier pour m'expliquer pourquoi ils avaient choisi quelqu'un d'autre finalement et je suis assez d'accord avec leur façon de voir les choses. Ils ont toutefois accepté de m'aider à me trouver une WG bientôt et on s'est promis de garder contact et se revoir (voir plus bas, si je me rends là, le cours de mathématiques).

Demain, mardi le 29 septembre, je rencontre un gars qui sous-loue un superbe appartement dans le même quartier. Je pourrais habiter là, seul, pour les deux prochains mois. C'est au-dessus du budget que je m'étais alloué, mais là, ça va faire! Je ne suis pas un voyageur qui fait le tour du monde dans sa valise, je traîne plutôt tout ce que j'ai de plus précieux dans deux grosses valises et un sac à dos et je souhaite m'établir, installer ma base, me poser quelque part où je ne suis pas stressé pour mes affaires, où je peux commencer à profiter de la ville pour vrai, en toute quiétude. Cet appart là est donc au-dessus de mon budget, mais ça serait niaiseux de passer à côté d'une offre comme ça, d'autant plus que j'ai nulle part où aller -- sauf l'hostel -- à partir de dimanche prochain. J'achète la paix pour deux mois, afin de continuer les recherches pour une WG à plus long terme à partir de décembre.

Berlin : jours 4 à 7


Je ne fais pas que ronger mon frein à longueur de journée et me plaindre (dans ma tête, parce que je ne peux pas encore me plaindre en allemand) des histoires d'appart, même si ça occupe beaucoup mes pensées. Mes journées berlinoises sont bien remplies!

La piscine du Mitte


Berlin, jour 4. J'ai écrit ça alors que j'étais encore à l'hostel.

Vue d'une chambre à l'hostel.
En fait, j'ai trouvé la photo sur internet,
je ne pense pas que ce soit celle dans laquelle j'ai habité,
quoique c'est difficile à dire, la chambre n'a jamais été aussi en ordre
que sur la photo pendant mon passage.
Aujourd'hui, j'ai une entrevue avec une WG éventuelle. Six gars dans Neukölln, je ne suis pas sûr mais ça vaut le coup d'essayer, surtout que c'est les seuls à m'avoir répondu, grâce à nos amis communs.
Le moral tient sur un fil, je passe beaucoup de temps dans ma tête. Hier, j'avais décidé d'aller nager mais je suis arrivé et c'était fermé. J'avais mal lu les petits caractères sur le site web.
Ça pue dans ma chambre d'hostel. Je ne m'alimente pas super bien. Mon sommeil n'est pas régulier, même si j'arrive quand même à surprenamment bien dormir malgré l'oreiller. Ma stratégie de mettre du stock pour quatre jours dans mon sac à dos fonctionne bien, je n'ai eu à aller dans ma valise qu'une fois depuis mon arrivée.
Bon, soit je vais nager, soit je vais jouer du piano. Ce sont des choses qui me font plaisir, qui me redonnent du pep et qui sont positives.

Je suis donc allé nager à la Stadtbad Mitte (Stadt = municipalité, Bad = bain, Stadtbad = piscine municipale, Mitte = milieu, le nom d'un quartier au milieu de Berlin). Check it out! Une piscine de 50 mètres de long pensée dans les années 1880 et inaugurée en 1930. La piscine a été endommagée par deux bombes (!) en 1945, mais le tout a été reconstruit aussitôt.

Le Stadtbad Mitte, photo trouvée sur le très beau site web des piscines de Berlin
C'est la piscine avec la section « pas creux » la moins creuse que j'ai jamais vue, l'eau m'arrivait à peine aux genoux. Peu importe, c'est pas long que c'était assez creux pour nager et tout ça m'a fait du bien! Après ça, un gros spaghetti et on est d'attaque pour la suite.

Day off


Berlin, jour 5. Le 26 septembre, c'était le temps de checker out de l'hostel et je me suis rendu chez mon ami qui m'héberge depuis. J'ai apporté mes affaires et je n'ai rien fait de la journée, ni de la soirée. J'ai dû dormir 12 h cette nuit là.

Le mur de Berlin


Berlin, jour 6. C'était hier ça, le dimanche 27 septembre et il faisait beau soleil. Nous avons décidé de se faire une petite journée touristique, après ma longue session habituelle de recherche d'appartements du matin. On est donc parti à pied vers Bernauer Straße, où se trouve le site du Mémorial du mur de Berlin. On a vu plein de choses surprenantes en chemin.

On a donc commencé notre randonnée en longeant l'ancien mur de Berlin, dont des morceaux subsistent, ça et là, sans cérémonie. Ma tête de Nord-Américain trouve ça assez surprenant. Je pensais à ces quelques morceaux du mur de Berlin que j'ai vus dans des musées ou au Consulat d'Allemagne, petits éclats de béton que l'on garde sous verre et qui semblent contenir à eux seuls un microcosme du drame qui a eu lieu ici. Sur le terrain, les quelques bouts de mur de Berlin qu'on a croisé au début de notre marche n'étaient pas traités avec autant de cérémonie. Une section du mur, comme ça, subsistait comme n'importe quelle autre vieille affaire qui traîne, à côté d'un site de construction, accessible à n'importe qui. J'aurais pu en arracher un motton, mais pour faire quoi?

Bien vite, nous sommes parvenus à un parc très tranquille, où se trouvaient quelques familles, un peu partout. Des arbres, le chemin de gravier, une balançoire, les parcs de Berlin sont très jolis.

Ensuite, sans crier gare, le chemin a débouché sur une vaste étendue où il y avait beaucoup de monde. Un genre d'hybride entre le Parc Lafontaine (Montréal), le Marché Jean-Talon (Montréal), le Marché aux puces Jean-Talon (Charlesbourg), le tout de la grosseur des Plaines d'Abraham (Québec) avec plein d'arbres, des musiciens de rue, des kiosques avec toutes sortes de cochonneries à vendre. Il y avait un amuseur public qui fait tous les dimanches un spectacle de karaoké très populaire. Des gens dans la foule se présentent au micro et chantent quelque chose de leur choix. Je me suis permis une photo.


J'ai trouvé les Berlinois tellement disciplinés! Ils sont là, en rang d'oignon, et regardent le spectacle attentivement. Ils applaudissent quand c'est le temps, ils écoutent respectueusement, ils font attention de ne pas cacher les autres, ils boivent de la bière ou pas de bière comme d'habitude, ils embarquent quand c'est le temps de bouger les bras tout le monde ensemble, pas plus, pas moins. Vraiment particulier.

Nous avons ensuite fait le tour du marché au puce qui se tient là le dimanche. Intense! Une vrai marché aux puces avec tout ce qu'on peut s'attendre à retrouver dans un marché au puces : des vinyles, quelques CDs, des livres, des sacs de Berlin, des t-shirts d'artistes, des meubles usagés, des meubles neufs, des saucisses, de la bière, des cafés, des cartes postales d'époque et beaucoup beaucoup de monde.

Et ensuite, le Mémorial du mur de Berlin.

Je me rends compte que je ne connais absolument rien de l'histoire de l'Allemagne, encore moins de celle de Berlin. Je me rends compte que tout se mélange dans ma tête : Hitler, le mur de Berlin, ... c'est des époques bien différentes, quoique liées. Il faut s'imaginer un instant des gens brisés par la guerre et la folie nazie, qui se relèvent à peine de tout ça, et qu'on déchire à nouveau pour une utopie à quelque part tout aussi farfelue, aux conséquences désastreuses pour les habitants de Berlin, séparés par une rangée double de murs, au milieu desquels le « no man's land » signifie la mort.

On a vu beaucoup de choses émouvantes, mais je sens que je ne comprends pas assez le contexte pour saisir l'ampleur de tout ça et être capable d'en parler.

À la recherche d'un piano


Berlin, jour 7. Aujourd'hui, après avoir parlé à mon locateur éventuel, je suis parti à le recherche d'un piano. Il semble qu'il s'agira d'une autre quête pas évidente. J'ai été, un peu à l'aveuglette, à l'un des 40 bâtiments de l'Universität der Künste (Université des arts) et j'ai fini par trouver quelqu'un qui m'a indiqué où se trouvait la faculté de musique, non sans m'être fait gentiment revirer de bord par la madame du Jazz-Institut. Du côté de la faculté de musique, pas moyen d'entrer si on n'est pas étudiant. Je vais continuer mes recherches bientôt.

À venir


Si je peux finir par me trouver un appartement, je vais me louer un violoncelle. J'ai peut-être des choses très intéressantes à dire à ce sujet, des projets, mais je n'ose pas en parler tout de suite.

Je me suis trouvé un cours de mathématiques! C'est un des gars de la WG qui m'avait passé en entrevue qui m'a donné le filon. Il étudie en informatique et je lui demandais s'il pouvait me trouver un cours de math auquel je pourrais assister. Il a justement un cours d'algèbre linéaire la session prochaine à l'université et m'a invité à y aller avec lui. Bingo! Ici, la session commence à la mi-octobre.

Je veux parler de l'alimentation à Berlin. Il y a des restaurants vegan et végétariens partout! Adieu le préjugé des Allemands qui ne mangent que de la saucisse et de la choucroute. Quoique, la choucroute c'est végétarien.

Je veux parler des bars, dans lesquels ça fume la cigarette à fond. Et dans lesquels il se passe bien des affaires.

Je veux parler du transport en commun. Les magnifiques paysages découpés par le S-Bahn, la propreté étonnante des lieux, l'efficacité de tout ce système S-Bahn, U-Bahn, tramway, autobus vraiment bien pensé depuis les années 1930 je crois.

Je veux parler des adresse. Ici, souvent les chiffres se suivent d'un côté de la rue et continuent de l'autre côté. Par exemple, en marchant à droite de la rue il y a 81, 82, 83, 84, 85, ... puis au même endroit, de l'autre côté de la rue il pourrait y avoir 140, 141, 142, ... Bonne chance quand on veut trouver une adresse, d'autant plus que les façons de numéroter changent d'une rue à l'autre.

Je veux parler des cafés. Je n'ai encore vu personne travailler sur son laptop dans un café. Pour l'instant ma théorie c'est que c'est tellement difficile de se trouver un appartement à Berlin, que quand tu en as un, tu restes là et tu n'en sors plus.

Pilsner Urquell, ç'a pris du gaz écrire tout ça.












jeudi 24 septembre 2015

48 h à Berlin : choc culturel, un concert, recherche d'appartement, apprendre l'allemand à Berlin, la vie à l'hostel

Choc culturel


Un choc culturel, je pense que c'est quand la signification de quelque chose n'est pas la même d'une culture à l'autre. Il n'y a pas grand choc culturel à avoir entre le Québec et Berlin, il s'agit d'une grande ville multiculturelle occidentale comme une autre j'imagine. Le système de transport en commun, par exemple, est vraiment bien organisé, un peu comme Montréal. Il y a un tarif pour une courte distance (Kurzstrecke 1,60€ = 2,40$), un tarif régulier pour le secteur métropolitain (2,70€ = 4,00$) et toutes sortes d'autres possibilités telles une carte illimitée pour 7 jours, une carte illimitée d'une journée, la passe d'un mois (79,50€ = 118,90$), etc.

Mon choc culturel, c'est les graffitis. Et je ne parle pas de jolis graffitis artistiques, je parle de graffitis comme les photos plus bas, croquées juste en face d'ici : signatures incompréhensibles, croquis approximatifs, etc. Chez nous, que ce soit Québec, Rimouski ou Montréal, quand il y a des graffitis comme ça, on est dans un endroit plus trash qu'ailleurs. Il y a des graffitis dans les petites rues du quartier St-Roch, des les toilettes de certains cafés ou bars, il y en a dans les ruelles de Montréal aussi. Ici à Berlin, des graffitis comme ça, il y en a partout. Ça me prend un certain temps à changer d'idée sur ce qu'ils signifient. Alors qu'au Québec les graffitis signalent une place trash, à Berlin les graffitis ne signalent rien de particulier.

Ceci n'est pas un squat, c'est probablement un appartement bien ordinaire qui se cache derrière

De l'autre côté de la rue, même affaire
Je pense que j'avais eu la même réaction lors de mon premier voyage ici. Ç'a quelque chose de quasiment oppressant, d'avoir l'impression d'être dans une ruelle de Montréal tout le temps, sans jamais arriver à un endroit où on se sent plus en sécurité. Puis les yeux, et surtout l'esprit, s'habituent et on se rend compte qu'il faut changer de cadre de référence, enlever l'interprétation qu'on fait de ce symbole là, les graffitis.

Et petit à petit, on ne les voit plus. On se rend compte que les bicyclettes, par exemple, ne sont pas barrées avec autant de précautions qu'à Québec ou Montréal. On se rend compte que les gens se regardent dans la rue sans arrière pensée. On voit que les gens qui travaillent dans les cafés ont toujours le sourire quand ils voient quelqu'un entrer. On voit que les gens semblent détendus, certains dans leur bulle, d'autres moins. Il faut dire qu'il commence tout juste à faire froid à Berlin, je pense que les gens ont le visage universel des habitants des pays à quatre saisons quand l'automne vient de s'installer tout d'un coup. Il fait entre 15°C et 18°C ces jours-ci, avec pas mal de grisaille.

Un premier concert


J'ai été voir un concert de Andrea Neumann, une suggestion du site web (et de la page facebook) Echtzeitmusik. Je me demande si « Echtzeitmusik » signifie la même chose que « free improvised music », « musique spontanée », ... en tout cas tous les concerts que la liste propose m'intéressent!

Andrea Neuman a une formation en piano et nous a joué deux pièces où le piano est utilisé de façon plus traditionnelle. Elle a toutefois joué principalement sur un instrument qu'elle appelle le Innenklavier. C'est une version réduite d'une table d'harmonie de piano, sans le clavier, qu'elle amplifie et de laquelle elle tire toutes sortes de sons. Elle peut se servir de cet instrument pour jouer des pièces pour piano qui demandent uniquement de jouer à l'intérieur du piano (il y en a), et elle développe son propre langage de compositrice et d'improvisatrice là dessus.

C'était vraiment hot. Pour donner une idée de mon état d'esprit depuis les derniers jours, voici ce que j'avais comme info avant d'aller au concert. Oui, tout est en allemand, il faut se concentrer sur chaque mot et on finit par comprendre, en gros, ce qui va se passer.
Werke von Heather B. Frash, Phill Niblock, Robin Hayward, Andrea Neumann, Chiyoko Szlavnics, George Brecht und György Ligeti
Das Programm präsentiert sieben Werke zeitgenössischer Komponist_innen, die im Zeitraum zwischen 1978 und 2015 entstanden sind. Ein Großteil der Kompositionen beschäftigt sich mit dem erweiterten Klangspektrum des Klaviers und werden von Andrea Neumann auf dem speziell für sie angefertigten Klavierrahmen präsentiert. Hierbei spielen die elektronische Verstärkung und die Verwendung von extended techniques eine maßgebliche Rolle.
Bei vier der Kompositionen kommt ein Zuspiel zum Einsatz. Das Verhältnis von elektronischem und elekto-akustischem Klang wird in jedem dieser Stücke anders reflektiert: als Kontrast zwischen der Flexibilität des elektronischen Signals und der Statik einer angeschlagener Taste, als Verflechtung von Texturen und Frequenzen, als Moment der Auslösung (Trigger).
Daneben werden zwei Stücke für traditionelles Klavier gespielt, die mit dem reduzierten Gebrauch von Intervallen, bzw. Tönen und deren konsequenter Durchführung spielen.
Darüber hinaus enthält das Programm performative Elemente, die die Performerin als klang-auslösende, körperlich präsente Instanz thematisieren.
J'ai appris un mot ce soir là -- comme à peu près à toutes les heures de tous les jours depuis mon arrivée -- c'est « Zuspiel ». Je crois que ça veut dire « amplification ».

Recherche d'appartement


Ça avance, ça avance mais je n'ai toujours rien trouvé. Je commence chaque jour avec une longue session de recherche d'appartement : je consulte les petites annonces de wg-gesucht, des groupes facebook, de craigslist, je parle à des amis d'amis, j'ajoute du monde comme ami sur facebook en espérant qu'ils se rappellent de moi s'ils entendent parler de quelqu'un qui cherche des colocs, ... et j'écris plusieurs emails. J'essaie d'avoir l'air gentil en quelques mots d'allemand et d'anglais, dur à dire comment c'est interprété à l'autre bout!

Ma boîte de réception, avec toutes les confirmations de emails envoyés à des colocs potentiels
Je continue les recherches aujourd'hui.

Apprendre l'allemand à Berlin


J'écris ceci alors que j'ai une dizaine d'onglets d'ouverts dans mon écran d'ordi, tous avec une école d'allemand différente. Pas facile de trouver un cours d'allemand à bas prix à Berlin! Et pas facile de se démêler dans tout ça, car certains donnent un tarif par bloc de cours, d'autres par semaine, par mois, par forfait. À peu près tout le monde n'offre que des sessions intensives... Par exemple :

  • Goethe institute : entre 450€ et 2400€ pour 8 semaines intensif, des cours tous les jours;
  • Volkshochschule : 130€-150€ par module, chaque module dure 100 leçons, il y a 2 ou 3 rencontres par semaine et chaque rencontre couvre de 4 à 5 leçons;
  •  GLS école d'allemand : de 20 à 30 leçons par semaine à coup de 4 par jour, entre 195€ et 555€ dépendant du forfait;
  • Babylonia e.V. : cours d'intégration, chaque module coûte 180€, 4 rencontres par semaines, il y a 6 modules dans l'année avant d'avoir fini le programme;
  • Deutsch Akademie : 3 heures par jour, 4 jours par semaine, 250€ pour 4 semaines, 475€ pour 8 semaines;
  • Transmitter Sprachschule : entre 100€ et 190€, extensif ou intensif, je ne comprends pas trop la formule;
  • Sprachenatelier : 20 cours par semaine, 340€ pour 4 semaines, 600€ pour 8 semaines;
  • ...
Ça continue comme ça indéfiniment, je ne pensais jamais que ça serait aussi compliqué et restrictif. Je suis toutefois finalement tombé sur un site (malheureusement pas daté) qui recense les meilleures écoles par fourchettes de prix.

C'est ma troisième journée à Berlin, pas de panique. 

La vie à l'hostel

J'ai vraiment hâte de sortir d'ici. Pour l'instant mes deux grosses valises sont dans une salle barrée au sous-sol et je fonctionne avec un casier dans la chambre (rappel : c'est une chambre style dortoir avec des lits superposés, on est 16 personnes là dedans), alors rien à craindre côté sécurité, bien qu'une fille se soit fait voler toutes ses affaires dans son casier... elle avait un cadenas cheap. Pas moi.

Le plancher en sortant des douches est toujours mouillé et un peu sale. C'est normal, et l'endroit est quand même assez propre, mais il y a du monde partout et je suis tanné de vivre là dedans, j'ai besoin d'avoir la paix et de ne pas toujours être en train de me demander si mon cadenas est bien fermé.

Aujourd'hui je vais probablement visiter un appartement que je pourrais sous-louer pour une semaine, ça me donnerait du temps pour me chercher une autre opportunité à court terme ou arriver à me trouver des colocs à plus long terme.

J'ai aussi prévu aller jammer avec un gars aujourd'hui! Il joue de la guit, il aime Sonic Youth, il vient de se trouver un drummer et il va me prêter une bass. J'aimerais ça jouer sur une grosse bass dans un gros ampli!

J'ai hâte d'aller nager aussi. Encore une fois, il y a un peu de recherche à faire et de mots à apprendre car toutes les infos sont sur des sites de la ville tout en allemand.

mardi 22 septembre 2015

Dans l'avion

C'est en partant de Montréal que j'ai commencé à prendre conscience du ridicule de mon itinéraire de vol Montréal-Istanbul-Berlin. Je suis parti à 23 h 05 et je suis arrivé à Istanbul presque 10 h plus tard, non sans avoir survolé la pointe du Groenland, l'Islande et à peu près toute l'Europe, incluant Berlin. Je n'ai pas beaucoup dormi, l'avion est aussi inconfortable, sinon plus, qu'un Orléans Express. J'ai dû niaiser pendant 3 h dans le gros aéroport d'Istanbul avant de repartir vers Berlin. En tout et partout, j'ai été environ 16 h dans le monde des avions et des aéroports. Je suis arrivé à mon lit vers 22 h (heure de Berlin).

Un ami à Berlin est venu me chercher à l'aéroport, j'étais bien content de ne pas avoir à trouver mon chemin pour me rendre au hostel : je commençais à être assez fatigué et je traîne pas mal de stock malgré tous mes efforts pour voyager léger (voir article précédent). J'utilise le mot « hostel » pour décrire le Xberger, où je loge pour les 5 prochains jours, car l'équivalent français « auberge » a beaucoup trop de classe pour ce que c'est ici. Nous sommes 16 personnes à partager une grande chambre de lits superposés. Il y a plusieurs chambres semblables dans l'établissement, difficile de dire combien de personnes logent ici. À 13 € la nuit (moins de 20$ canadien), c'est juste parfait pour dormir et déposer mes affaires. En toute sécurité. Jusqu'à preuve du contraire.

On a donc pris une bière, mon ami et moi, sur le Oberbaumbrücke [Pont Oberbaum. Ober : supérieur, Baum : arbre, Brücke : pont], le parfait accueil berlinois. Je me suis couché à minuit, heure locale, et je me suis réveillé à 8 h 30, heure locale. Je plains les personnes qui souffrent du décalage horaire, moi je t'ai réglé ça drette en partant.

Oberbaumbrücke, tel que je l'ai vu hier soir, à quelques pas de mon hostel.
J'ai emprunté la photo sur internet.

Je vais à un premier concert à Berlin pas plus tard que ce soir : « Andrea Neumann plays compositions for piano and for her instrument, the "innenklavier" (inside piano). » J'ai hâte!

J'ai écrit un peu dans mon calepin hier.

20 septembre 2015, 22 h 50 (heure de Montréal)


Je suis dans l'avion, on décolle dans quelques minutes.
J'aime beaucoup Turkish Airlines jusqu'à date.
On n'a vraiment pas beaucoup de place pour s'asseoir mais l'avion n'est pas plein alors j'ai le banc à côté pour gratis!!

J'ai peur d'avoir mal aux oreilles, je me suis apporté des crudités pour le décollage.

Je suis parti pour une sacré aventure. Ça fait plusieurs mois que je ne travaille plus, que j'ai quitté ma ville et ma job, mais c'est maintenant le coup d'envoi officiel.

L'avion recule. La température à l'intérieur est parfaite pour l'instant et tout le monde est vraiment vraiment calme.

J'ai hâte d'arriver à destination, mais pour l'instant je me suis embarqué dans tout un détour : Montréal-Istanbul-Berlin. Ça se décline ainsi : un vol de 9,5 h jusqu'à Istanbul, 3 h d'attente à Istanbul et un vol de 3-4 h jusqu'à Berlin pour un total de près de 16 h de voyagement. C'est pire qu'aller à Percé à partir de Montréal en Orléans Express!

L'avion recule toujours. Ce que je pensais être un plus petit avion à côté de nous est en fait le bout de l'aile. Ha ha!

Ça y est, ça avance. Non, c'est simplement arrêté et je m'étais habitué au mouvement. Est-ce qu'on peut faire une métaphore avec ça? Genre sur la vie, le chemin qu'on prend.

21 septembre 2015, 18 h 33 (heure d'Istanbul)


Le premier vol s'est très bien passé. J'ai ensuite niaisé pendant près de 3 h dans le gros aéroport d'Istanbul. J'aurais aimé être plus en forme, avoir moins de sacs à traîner et avoir un peu de monnaie locale pour une bouteille d'eau mais j'ai dû m'en passer. Enfin, ce n'était qu'une escale.

Alors que le premier avion était gros et que j'ai eu la chance de ne pas avoir de voisin, celui-ci est plus petit et plein à ras bord. Je ne sais pas si on aura à manger, j'ai besoin de dormir un peu, au moins emmagasiner assez d'énergie pour prendre l'autobus de l'aéroport de Berlin à mon hostel.

Ça commence enfin à parler allemand autour de moi, on arrive on arrive.


Dans ma valise (version 2)

Finalement j'avais droit à 2 sacs de 23 kg + 1 sac de 8 kg (bagage à main) + 1 item personnel (genre sac de laptop)

Gros sac (19,10 kg)
  • Poche du fond
    • manteau d'hiver
    • 2 foulards + tuque + gants
    • 2 chemises noires
    • sac pharmacie noir
    • étui à crayons
    • boîte à trombones, épingles à couches, pinces
    • boîte à lunch (vide)
    • sac rouge (vide)
    • oiseau en plastique
    • étoile orange
    • 2 x bas/boxers
    • 2 x boxers
    • costume de bain jaune
    • tube (2 archets, colophane, diapason, mute, pick-up, rondelle à pique)
    • Partitions (Bach WTK II, Lieder, ballet)
  • Poche du bas
    • 14 x débarbouillettes
    • costume de bain rouge
    • déo
    • sac Radio-Canada
  • Poche du milieu
    • Sleeping bag + couverte
    • oreiller
    • Roudoudou
  • Poche du haut
    • sac de plastique (shampoing, conditionner, savon, spray)
    • sac pharmacie léopard

Valise or (12,91 kg)
  • Souliers beiges
  • Souliers noirs + cravates
  • speakers bluetooth + fils
  • 7 x t-shirt
    • orange chat
    • orange Sonic Youth
    • blanc NIRVANA
    • brun NIRVANA
    • gris NIRVANA
    • noir Proust
    • noir DJ spin that shit
  • 3 x chemises carottées
    • vert
    • jaune
    • blanc
  • 2 x polos
    • rouge
    • rose
  • 6 x gilets
    • bosselé club monaco
    • bleu club monaco
    • Lana del Rey
    • cardigan brun
    • coton ouaté rouge
    • laine rouge et gris
  • 2 x jeans
    • beiges
    • vertes
  • 4 x bas/boxers
  • tasse Sonic Youth
  • imperméable
  • disque dur externe
  • noeud papillon
Sac à dos
  • 4 t-shirts (jaune La Vide, blanc KRS, gris KRS, gris Murray st. band)
  • 4 x bas/boxers
  • joggings de pyjama
  • kit de piscine (costume de bain bleu, lunettes, cadenas, serviette)
  • fer
  • sac mauve
  • laptop + plug
  • 4 x cassette
Sac à ordi
  • 1 x cassette
  • livres (agenda, notebook, Algebra, feuilles, dictionnaire allemand-français)
  • connecteur USB à USB-C
  • passeport
  • fil tortillé
  • cell + plug
  • sac gris Babes in Toylansd
Je porte
  • polo rayé
  • jeans noires
  • gilet club monaco noir
  • hoodie noir pas de manches
  • manteau d'automne noir
  • bas/boxers
  • écouteurs

jeudi 17 septembre 2015

Dans ma valise

Je n'arrête pas de jeter des affaires!
J'ai droit à 20 kg pour ma valise (gros sac) + 8 kg pour mon bagage à main (petit sac) et un item personnel, si j'ai bien compris.

J'ai refait mes bagages plusieurs fois, c'est toujours trop lourd et je ne sais plus de quoi je peux me débarrasser.

Bon débarras


Je m'étais acheté une belle petite valise à roulettes, bien mesurée pour qu'elle corresponde à ce à quoi j'ai droit comme bagage à main. Je m'en débarrasse finalement, car elle pèse à elle seule plus de la moitié du 8 kg auquel j'ai droit.

Mon idée géniale d'apporter une powerbar est finalement assez dangereuse selon ce que j'ai lu.
Le séchoir canadien va aussi rester ici.

Mes bagages


Gros sac (19,4 kg), Bagage à main (10,13 kg), Item personnel (sac d'ordi)

[Mise à jour : il y avait la liste ici, mais je l'enlève pour ne pas me mêler avec la plus récente. Finalement je me me suis pas débarrassé de la « belle petite valise à roulettes ».] 

Décompte : 4 jours

À quelques jours de mon départ, je reviens sur le chemin parcouru depuis l'achat de mon billet d'avion. Je me permets également une réflexion sur la notion de « courage » et sur l'ampleur que je donne à ce projet.

J'ai acheté mon billet d'avion il y a cinq mois, le 16 avril 2015. Ça fait donc cinq mois que je pense à mon affaire, que j'organise mes flûtes, que je me prépare mentalement aussi. J'ai franchi toutes les étapes afin d'obtenir mon visa de travail à la manière d'un alpiniste : la paroi me semblait haute, le chemin difficile, mais, maintenant que j'ai escaladé, je regarde en arrière et j'ai l'impression que ce n'était pas si pire. J'ai été au Consulat d'Allemagne à Toronto et j'ai passé à peine plus de 10 minutes avec l'agent. J'ai remis les papiers dûment complétés, on a pris mes empreintes digitales puis mon visa est arrivé moins de 48 h plus tard. Einfach!

J'ai quitté mon emploi (ou plutôt, mes emplois) et j'ai quitté Rimouski. Ça n'a pas été très difficile, j'en avais ma claque depuis un bon moment. J'ai bien eu un petit moment de vertige juste avant de partir, j'ai fait un dernier tour de ville à vélo, une boule dans la gorge, et je me suis rappelé des réussites et des écueils. J'ai ramassé quelques papiers au bureau, afin de bien fermer les dossiers. Tout ça m'a permis de passer le plus bel été de ma vie. J'en parle ici. Je me suis peu ou pas intéressé au retour au travail de mes anciennes et anciens collègues, désolé! Leur réalité me semble soudainement très loin de la mienne, je me sens libre, cette vie m'emprisonnait. Je me suis peu ou pas intéressé aux actualités rimouskoises. Tout ça me semble également très loin, très petit, j'observe l'énergie déployée par les gens qui y sont toujours et ça me dépasse. Je me reconnais dans leur implication, mais je ne me sens plus concerné. Je fais du ménage dans mes contacts facebook.

On me dit que je suis « courageux ». C'est vrai que ça prend une bonne dose de confiance en soi et d'audace pour tout quitter, mais je vois les choses autrement. Pour moi, il s'agit d'une décision naturelle, presqu'inévitable. Je ne pouvais pas être heureux à Rimouski, à moins de me contenter d'une vie de militant solo ou presque, de célibataire par la force des choses, de travailleur s'éloignant de plus en plus de la création faute de temps. Entendu qu'il me fallait quitter, où devais-je aller? J'ai pensé à Québec, par dépit, parce que je pensais que c'était tout ce que j'avais les moyens de faire, après avoir payé 8000$ pour me sortir d'une histoire de bail de location commercial pour un projet artistique et communautaire qui a floppé. Mais finalement, ma vie d'économe et ma job de burn-out-presqu'assuré ont fini par payer. Pourquoi Berlin? Pourquoi pas. Donc pour moi, il ne s'agit pas vraiment de courage. Ce qui aurait été courageux, ç'aurait pu être de rester à Rimouski et de me dépenser afin que les mentalités changent et que j'aie ma chance à la course au bonheur. Le courage, ça aurait aussi pu être de déménager à Québec et de tenter de ne pas arriver au même résultat qu'à Rimouski, mais en utilisant les mêmes tactiques. Tout ça pour dire, dès que je me suis rendu compte que mes finances étaient en train de s'enligner, j'ai pris ma décision. Et dès que la décision est prise, pour moi il n'y a plus de retour en arrière possible, seulement des étapes à franchir. C'est pourquoi je ne me sens pas si courageux, d'autant plus que ce n'est pas si une grosse affaire que ça (voir plus bas).

Mes « possessions » sont soit données, soit entre bonnes mains : mon piano est au Bic chez une ancienne collègue de travail, mes vinyles sont chez mon père, ma paperasse et les quelques objets et souvenirs que je garde sont chez ma mère, mon équipement de musique est dans un local au Cégep et j'ai un paquet d'autres cossins chez une bonne amie à Rimouski. Si j'ai parfois l'impression d'avoir tout abandonné pour essayer une autre vie, je n'ai qu'à appeler l'image mentale de tous ces lieux d'entreposage temporaire pour me convaincre du contraire.

On me dit que je suis « chanceux ». Euh, non, je dirais plutôt que je suis fier d'avoir réussi ne pas faire un burn out avec toutes mes jobs, fier d'avoir réussi à économiser pour me payer ça malgré toutes les dettes d'études, etc. ; disons que je n'ai pas vécu dans le luxe à Rimouski (ni à Montréal avant ça d'ailleurs). Qu'on ne me parle pas de chance, j'ai travaillé fort!

J'essaie de ne pas voir mon départ comme quelque chose de trop gros, malgré les commentaires que me font plusieurs! Je ne sais pas pour combien de temps je pars, c'est vrai, mais je ne pense pas à long terme pour l'instant. Mon billet d'avion indique un retour prévu 6 mois après mon arrivée (c'était le mieux que je pouvais faire au moment de l'achat) et j'ai l'intention de changer la date de retour pour septembre 2016. C'est ce à quoi mon visa de travail (le Youth Mobility Agreement) me donne droit, un an de travail. Il y avait même une signature requise dans un des formulaires, par laquelle je m'engageais à ne pas rester plus longtemps que la durée du visa.

Dans mon entourage, plein de gens partent en Europe chaque année, même deux fois par année. Et on dirait que tout le monde à qui je parle connaît plusieurs personnes qui sont, elles aussi, parties un an en Europe un moment donné. Je ferai bientôt partie des gens qui commencent leurs phrases en disant « l'année où j'étais en Europe [...] ». Je vais essayer de ne pas trop être gossant avec ça.

On me dit que je ne reviendrai peut-être pas. Je ne suis vraiment pas là pour l'instant. Laissez-moi commencer par partir! Je ne veux pas être déçu de mon expérience, alors je ne place pas la barre trop haut. Si je ne trouve rien là bas, je dépenserai mes économies et je reviendrai dans 3 ou 4 mois. Si je trouve quelque chose de super, je resterai jusqu'à un an. Si j'ai envie de rester, il faudra que je fasse de la paperasse pas mal, j'imagine, je n'ai pas regardé ça du tout. Chaque chose en son temps.